Entretien avec Adèle Michon, directrice des opérations au Québec, Sentinelle Outaouais

Adèle Michon a consenti à une entrevue avec Katharine Fletcher, dans laquelle elle explique son rôle et son point de vue concernant le mandat de Sentinelle.

par Katharine Fletcher

Adèle Michon est directrice des opérations au Québec pour Sentinelle Outaouais, l’organisme à but non lucratif voué à la protection du bassin versant de la rivière des Outaouais. Alors que Meredith Brown, Sentinelle depuis 11 ans mais basée en Ontario, est bien connue, notre représentante au Québec, embauchée en septembre 2013, l’est beaucoup moins.

Adèle Michon a consenti à une entrevue par courriel, dans laquelle elle explique son rôle et son point de vue concernant le mandat de Sentinelle.

KF : Adèle, quels sont vos antécédents?

AM : J’ai un diplôme en environnement et développement durable de l’Université McGill et une maîtrise en géographie de l’Université Carleton. J’ai travaillé avec des ONG et des agences gouvernementales au Québec et à l’étranger pour examiner des façons d’impliquer les collectivités locales et les Premières Nations dans la protection active de leur environnement naturel. Ces expériences m’ont préparée à établir des relations avec les diverses communautés de la rivière des Outaouais. J’ai commencé à travailler pour Sentinelle Outaouais en septembre

KF : Pourquoi avez-vous postulé au poste de directrice des opérations au Québec de Sentinelle Outaouais?

AM : Depuis que j’ai déménagé, toute jeune, des montagnes du sud de la France à Montréal, je me passionne pour la protection de la nature, surtout celle des rivières. Quand j’ai déménagé à Ottawa, la rivière m’a éblouie avec ses plages calmes et ses rapides sauvages. Je souhaite consacrer ma vie à protéger ce que j’aime, alors il m’a semblé que ce poste serait idéal pour moi!

Sentinelle Outaouais protège les rivières pour le bien-être des communautés qui en dépendent. Je crois que nos rivières et nos lacs doivent être suffisamment en santé pour soutenir une faune variée et pour offrir de l’eau potable saine et des activités récréatives durables. Ce sont là nos droits et c’est de notre responsabilité d’assurer qu’ils en restent ainsi.

KF : Pourquoi est-ce important que la rivière des Outaouais ait une sentinelle?

AM : La Sentinelle donne une voix à la rivière. Elle défend ses intérêts de façon indépendante. Il y a plusieurs facettes à un enjeu donné, mais, bien souvent, c’est l’aspect économique qui domine. La Sentinelle ramène un équilibre dans les discussions, en fournissant aux communautés locales la force et les connaissances nécessaires pour protéger leur droit à une rivière des Outaouais dans laquelle elles peuvent nager et pêcher, et dont elles peuvent puiser leur eau potable.

KF : Pourquoi avons-nous besoin à la fois de sentinelles en Ontario et au Québec?

AM : À cause de son importance; la rivière des Outaouais mesure 1271 km de long et possède un bassin versant plus grand que l’Angleterre. Elle aussi est la frontière qui divise deux provinces dont les lois et la réglementation au sujet de la gestion des rivières et des questions environnementales diffèrent beaucoup. De plus, le gouvernement fonctionne surtout en anglais en Ontario et en français au Québec. Cette réalité rend difficile, pour une seule personne, de rester à jour sur tous les enjeux et d’entretenir des relations à la fois avec les communautés anglophones et francophones.

KF : D’après vous, quels sont les deux plus grands défis environnementaux qui affectent la rivière des Outaouais du côté québécois?

AM : Le plus gros défi auquel la rivière des Outaouais fait face, c’est qu’il n’y a pas d’approche intégrée de gestion de la rivière, pas de vision partagée ni de buts partagés qui prennent en compte le bien-être de la rivière et de tous ceux qui l’utilisent. Il n’existe pas d’agence unique qui soit responsable de la santé à long terme de la rivière. Aujourd’hui, nous avons une approche fragmentaire de gestion de la rivière et ce sera un grand défi de décider quelle agence ou quel ministère assumera la responsabilité de corriger les nombreux problèmes qui existent en lien avec la rivière.

Du côté québécois, il nous reste beaucoup de chemin à faire pour améliorer la gestion et le traitement des eaux de ruissellement et des eaux usées. La Ville de Gatineau jette régulièrement de grandes quantités d’eaux usées non traitées dans notre rivière. Cela affecte non seulement la faune de la rivière, mais aussi la mesure dans laquelle nous pouvons profiter de la rivière pour nous baigner et faire du canot pendant les journées chaudes de l’été.

KF : Nommez deux améliorations environnementales qui ont été accomplies depuis que vous faites partie de l’équipe et auxquelles vous avez participé.

AM : Les améliorations environnementales peuvent nécessiter des années de travail, et je ne fais partie de l’équipe que depuis une année. Ceci étant dit, je suis fière d’avoir pu accroître la compréhension du public de l’impact des égouts unitaires sur la qualité de l’eau et sur l’obstacle qu’ils constituent pour les personnes qui veulent faire de la baignade ou du canot en toute sécurité. Grâce à la surveillance directe de la qualité de l’eau du ruisseau de la Brasserie et aux activités de sensibilisation aux plages publiques, nous avons augmenté l’appui des citoyens gatinois vis-à-vis l’investissement nécessaire à la modernisation les réseaux d’égouts.

En outre, le nombre de personnes qui s’engagent dans les enjeux touchant la rivière a augmenté de façon significative depuis mon entrée en poste, l’année passée. Nous avons atteint un nombre équivalent de sentinelles au Québec qu’en Ontario. Ces leaders de la communauté habitent le long de la rivière et sont nos yeux et nos oreilles sur celle-ci. Ils sont en mesure de surveiller la qualité de l’eau et les enjeux qui s’y rapportent.

KF : Que pouvons-nous faire, nous, le grand public, pour aider? Comment pouvons-nous vous rejoindre?

AM : La meilleure façon de vous impliquer, c’est de plonger dans votre rivière ou lac, d’en profiter pleinement, et de vous informer au sujet de leur eau. D’où vient-elle? Quels poissons y vivent?

De plus, les personnes peuvent contribuer en restant informé sur les enjeux touchant leur partie de la rivière, en nous signalant toute problématique grâce à notre ligne-info antipollution (1-888-9KEEPER) et en parlant des bienfaits de la rivière dans leur municipalité. Plus elles connaîtront le sujet de l’eau, plus les personnes augmenteront leur capacité de passer à l’action et d’inspirer d’autres personnes à les suivre.

Nous sommes un organisme de bienfaisance enregistré qui accueille les bénévoles et les dons.

KF : Merci beaucoup d’avoir accordé cette entrevue.

AM : Merci à vous d’apporter un éclairage sur les enjeux environnementaux de notre région depuis tant d’années!

La chronique bimestrielle de Katharine Fletcher, Our Environment (Notre environnement), est publiée dans trois journaux du réseau Ryan dans l’Outaouais : le West Quebec Post, l’Aylmer Bulletin et le Pontiac Journal.

FIN de l’entretien